On fait des paris à la con des fois au boulot, et hier (je me maudis encore) j'ai parié que je prendrai la bastille à vélo et surtout, sans lever le cul de la selle ("tu me diras combien de fois t'auras posé le pied" me dit un pote en rigolant)...
J'étais à bloc ce matin, ptit déj. équilibré, pas surchargé, le vélo paré, bref tout va bien. Je me rends à La Tronche à la mairie pour attaquer l'ascension. Je mate un peu le parcours sur mon plan de grenoble, OK je visionne la route dans mon esprit, ça va le faire...
Rated M for Masochist
Je m'élance, ça grimpe déjà bien, je descends déjà les plateaux du vélo, je passe devant des maisons, l'ascension démarre plutôt bien, je prends un rythme, même s'il n'est pas violent, qui me permet de garder mon souffle. La pente commence à s'accentuer, je continue de monter mais surtout je continu de descendre les rapports, et je me rends compte que j'ai déjà atteinds le dernier pignon du dernier plateau. J'ai plus de marge. Je continue sur 200m comme ça, et là c'est le drame, un camion qui arrive par derrière, je suis obligé de m'arrêter pour le laisser passer. Evidemment la route est pas large. Le problème est que lorsque je me suis remis à pédaler, bah sans élan mon con, t'en chies comme un rat mort! La douleur s'intensifie, mais je will survive, je reste vaillant... 50m plus loin je lis des inscriptions sur le sol "+ vite!". Bah tiens y se fout de ma gueule celui là. Saloperie de taggeur! Je fais encore 50m et je suis obligé de m'arrêter. Ptite pause histoire de reprendre mon souffle (avec l'altitude on manque vite d'oxygène vous savez, j'avais déjà grimpé au moins 100m de dénivelé, la neige était plus très loin).
Continue? Insert coin!
Je repars, je lis d'autres inscriptions, "14%" puis "15%" puis "17%". Là je m'arrête, j'en repeux plus. Quoi? J'ai fait que 17%??? Plus tard, le sang affluant de nouveau jusqu'au cerveau, je compris que c'était l'intensité de la pente. On y retourne, une autre bagnole, je roule qd meme, ça passe. J'arrive au premier virage et je fais une pause pour boire un coup (j'avais pris soin de prendre une petite bouteille d'eau au cas où). Je ressors mon plan, je regarde vite fais où j'en suis pour savoir ce qu'il me reste à faire en chemin. Quoi? J'ai fait que 17%??? Putain mais j'en suis qu'au début!! C'était l'instant de vérité, soit je continuais jusqu'au bout, soit je prends la boite et je repars avec un coton tige euh.. je redescends en ayant rien accompli. Je suis pas une tafiole bordel! Je continue évidemment!
Le début de la fin
Je reprends la route, les jambes moins lourdes, j'avance bien... sur 100m, et là j'en chie, c'était même pas une question de crampe ou de souffle, j'appuyais tellement fort sur les pédales que c'est la roue avant qui se soulevait plutôt que le vélo qui avançait! Je m'arrête de nouveau, j'essaie de comprendre ce qui se passe, je regarde plus loin, le taggeur à écrit un fatidique "22%"!!! C'est pas une route, c'est un mur d'escalade! Pendant que je reprends mon souffle (j'ai l'impression de faire que ça depuis le début de l'ascension), je croise une mémé qui monte à pied avec ses batons de ski. Elle me dit en souriant "C'est dur à velo hein?" je lui réponds poliment que ça doit être encore moins évident à pied, et elle m'averti, vu qu'elle a vite compris que j'avais rien à foutre ici et que je connais encore moins la route "Au virage c'est dur jusqu'à l'arbre, après c'est plus tranquille". Merci mémé. Je ne la reverrai plus jamais. Non elle n'est pas morte. C'est moi qui suis mort.
Les virages c'est facile
On rattaque (moi et mon vélo, "on" quoi), je passe la partie 22% et j'arrive au virage. Les virages c'est facile, c'est les zones les moins pentus en fait, surtout si on prend l'extéreur, par contre si on prend le virage à l'intérieur, c'est sûr qu'il sera plus court, mais ca doit être un bon 40-50%! Je sors du virage, et jette un coup d'oeil sur la route. Bon je fais une pause. J'ai besoin d'avoir mes giboles au top de leur forme. Y a au moins 200m de pente entre 20 et 25% devant moi. Après y a un arbre qui gène la route. Et après on m'a dit que c'est tranquille. GOGOGO je grimpe, je sers les dents jusqu'aux gencives mais j'avance, et je m'arrête... 50m plus loin. Bon, second essai... qui aura duré 30m. Je comprends ton message mémé, mais je perds pas courage, après, c'est tranquille! Je continue mes stop & go jusqu'à l'arbre qui me fit de l'ombre occasionnellement. N'empêche ça cogne dur le soleil ce matin, j'avais gardé le pull jusque là mais j'ai tout quitter pour la suite. Y fait beau qd même, c'est agréable, en plus à partir de là c'est tranquille.
Tranquille? Terran-Kill!
Bon il est où ce putain de taggeur? Ah ça y est j'y arrive, 17%, effectivement c'est mieux que 22, mais 17% quoi! Je fais plus de 50m à chaque escale mais qd même, elle m'avait dit tranquille pourtant. En fait les vieux c'est toujours tranquille pour eux, ils ont le temps de faire les choses tranquillement. Je reprends la route tant bien que mal, je passe encore deux épingles, et je finis ma bouteille d'eau. Plus de carburant donc. Tant pis, je dois plus être trop loin de l'arrivée non plus. J'ouvre le sac pour vérifier ça sur la carte, et je le referme aussitôt, en me disant que si je jetais un coup d'oeil, je risquais de déchirer la carte en cas de désespoir. Un nouveau message du taggeur "Ca roule encore?". Saloperie de taggeur! Je continue et passe un nouveau virage.
L'espoir au bout du souffle
Y fait chaud, je transpire comme un chameau. La route me semble plus légère, je passe des 14%, 15%, ça aide forcément. News du taggeur: "Plus que 1 km!" Aaaaah c'est bientôt la fin du calvaire. GG taggeur! Pour une fois qu'il fait plaisir celui là, ça mérite une ptite pause tiens. Je jette un coup d'oeil à l'horizon, y fait beau, mais ça je l'ai déjà dit, n'empêche, y a un joli voile de pollution au dessus de grenoble (saloperie de pollueurs!). Je vois les oeufs de la Bastille (vous savez les cabines grotesques qui montent par pack de 5 à la queueleuleu). Attendez moi j'arrive! J'arrive au dernier virage. Des gens bossent dans le virage, c'est le moment de montrer ce que j'ai dans les tripes. Bon je me suis arrêté dès qu'ils ont eu le dos tourné, ça sert à rien d'être téméraire s'il n'y a pas de public. C'est sûr que je suis plus Michel que vaillant, mais au moins je tiens à ma santé. La santé avant tout. Bon pas la peine de trainer, alors que je suis dans la dernière ligne droite.
Astral Finish ou Fatal KO?
La dernière ligne droite! J'arrive au sommet du monde de Grenoble! Je passes devant une statue de maillot à poies, je me dis que je ne suis pas le seul qui a du en chier pour arriver jusque là! Ca me remonte le moral et j'appuies de plus belle sur les pédales, on y est mon gars, on y est! Aaaarg, la souffrance, c'est dans l'esprit, putain mais il fait mal l'esprit. Enfin arrivé!!! Je suis fier de moi d'un coup, en plus le sommet est tout plat, j'ai l'impression que mon pédalier tourne dans le vide (bah oui, en étant sur la 1ere vitesse, quand c'est plat on pédale dans la semoule). Je me dirige vers un grand espace gazonneux (et vert au passage, mais je l'appelerai gazonneux). Y a un restau, qui m'attends "Chez Pèr'Gras". Je savais pas que le communiste avait une résidence secondaire! Bon c'est que 10h45, je vais pas bouffer maintenant, j'ai donc mis 45 min pour monter qque chose comme 300m de dénivelé (et encore j'en suis pas sûr). En tout cas je retiens une chose. Ce matin, 17 Avril 2009, j'ai pris la Bastille, avec mes groles Cartepillar, comme un révolutionnaire (et non pas comme un futur chômeur)! Je m'assois pour contempler l'horizon, les cuisses n'arrivent plus à tenir dans mon jean tellement elles sont gonflées (j'avais des trucs à faire du matin et j'avais pas envie d'y aller en survet, stout!). Je profite d'être là pour me promener un peu.
Nouvelle quête, nouvelle impasse.
J'étais déjà venu ici une fois, à l'époque j'étais qu'un con de moufflet comme les autres, et j'avais pris les oeufs pour monter (quoique j'étais pas si con que ça à l'époque). Ca m'a rappelé qques souvenirs la bastille. Un pote du taff m'a dit que je pouvais redescendre à vélo de l'autre côté de la bastille, je me suis donc mis à la recherche de la piste cyclable tout en visitant les lieux. J'aperçois dans un recoin des barreaux d'échelles à l'horizontal, vous voyez les trucs qu'on fout dans des parcours de santé pour que les mecs s'entrainent à traverser à la force des bras. C'est un peu un parcours de santé la Bastille finalement. Je m'y essaie donc (bah j'ai que ça à foutre moi ce matin). Je me mets à faire une traction. Aie, le sang est resté coincé dans les jambes, pas dans les bras... M'en fous! J'y vais d'un coup, et je finis par traverser la longueur d'échelle suspendu. Ah qu'est-ce que je peux être con des fois. Je me remets donc à la recherche du sentier cycliste. Première impasse, je tombe nez à nez avec une porte de 30cm d'épaisseur qui me barre le premier passage. Bon j'étais qd même bien parti. Nouvelle tentative, on m'indique une direction pour arrivé sur St Martin le Vinoux. Nouvelle impasse. Bon je remonte un peu plus haut, je suis des gens qui redescendent aussi du fort. Encore une impasse aux cyclistes! Bordel mais c'est réservé aux piétons ici ou quoi? Je remonte donc pour essuyer une nouvelle défaite, et je finis par revenir sur le plateau de la Bastille. Bon bah j'ai plus qu'une solution, réemprunter la route tranquille.
La prière? Tous les matins!
Je me suis donc mis à redescendre la Bastille par mon itinéraire de départ. Un truc me parvint à l'esprit. J'en suis où avec mes freins? Si y a bien un truc que j'avais pas vérifié avant de commencer l'ascension, c'était bien les freins. Bon de toute façon on commence par une pente tranquille. Je maintiens une vitesse constante, je ralentis dès que je vois que le vélo s'emballe, jusque là tout va bien. Je fais 200-300m comme ça et je m'arrête, non pas que je sois crevé, mais parce que le soleil s'est caché, et ça s'est drolement rafraichis d'un coup. Je remet donc mon pull et la casquette et j'y retourne. 200m plus loin je commence a entendre un sifflement bizarre. Je me rends compte au bout d'un moment qu'il provient de mes freins. Je m'arrête pour vérifier leur état. Bon bah c'est tout plat. C'est normal non? Non. En fait les freins glissent sur la jante des roues. Du coup ça freine quand même, mais moins bien. Bon tant pis je continue comme ça, ça freine qd même. J'arrive au bout d'un moment au premier virage de la côte (premier dans le sens de la montée) et donc aux 22%. Bon dans ce sens ça va très bien les 22%. Je croise justement à cet endroit un cycliste qui en chie lui aussi. Aaah chuis content! Aaah j'ai trouvé barjo comme moi! J'eu envie de lui dire "Au virage c'est dur jusqu'à l'arbre, après c'est plus tranquille!". Mais bon je respecte les mecs qui en chie. Comme moi, comme d'autres, mais surtout comme moi. Et là c'est le drame. Mais que fait t'il? Il lève son cul du vélo! Espèce de sac! No respect! SCHHHH! Je le quitte around the corner pour la peine. Bon, nouveau problème. La pente n'est pas trop violente mais je prends de plus en plus de vitesse. Que se passe t'il? Je m'arrête pour réfléchir. Y a encore des freins. Par contre mes mains restent tétanisés. Ah bah merde, c'est vrai que ça doit faire bien 10 min que je sers les doigts comme un goret, ça pouvait que finir comme ça. Je sors mes gants (équipement de série du sac, GPS, pressuriseur, lecteur mp3, glaciaire, parresoleil, gants, la totale quoi!) pour atténuer la douleur et je finis la route comme ça, en espérant que ça passera plus tard.
Condoléances
Bon me voilà donc revenu de ma quête, l'objectif étant de grimper à la Bastille à vélo, sans décoller le cul de la selle. Mission accompli. Bon par contre j'ai compté, j'ai mis le pied à terre 18 fois. Le souci étant surtout que mon dernier pignon n'a jamais voulu passer, je m'en suis rendu compte qu'une fois en haut en fait, j'étais donc sur la 2e vitesse (scuse de sac included). Mais j'y retournerai, et cette fois, mon objectif sera de faire moins de 18 pauses! entre temps je m'achêterai un appareil photo pour avoir les images à l'appui. Bon ça fait une heure que je suis en train de tapper mon histoire et corriger mes photes d'aurtograffes, j'ai envie de pisser, mais mes jambes veulent plus bouger. Nouvelle mission: trouver rapidement un bocal...
ps: explication du lève-pas-ton-cul: qd tu es assis sur le vélo, tu pousses sur les pédales avec les jambes, qd tu es debout, tu pousses avec ton poids, donc debout dans une pente c'est logique, mais c'est troooop faciiiiiiile!!!
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